Manifeste pour les jardins méditerranéens, Actes Sud, 2012
1. Observez la logique du lieu, puis faites votre jardin en fonction de cette logique : sens naturel des pentes, données de la météo, sens et force des vents, circulation et drainage des eaux, risques d’inondation, d’incendie ou de mouvements de terrain, systèmes de végétation et leur stade d’évolution. Cette logique vous permettra de faire des économies sérieuses tout en créant des harmonies durables.
2. En travaillant votre terre, imaginez tout ce que vos prédécesseurs y ont déjà réalisé. Ce terrain est-il occupé depuis des siècles, recelant de précieux vestiges ? Vieux arbres, pierres, une haie, une citerne ? Ou faut-il déblayer, restaurer un sol pollué par de mauvais usages ? Pensez au passé comme à l’avenir du site.
3. Apprenez à connaître la flore et la faune de votre coin, même en ville. Varient-elles selon l’exposition, l’altitude, la concurrence des autres espèces ? Repérez les plantes spontanées bio-indicatrices pour savoir ce qui manque à votre sol. Etudiez les comportements et besoins des espèces qui cohabitent avec vous. Pouvez-vous les aider à vivre, ou déjouer leurs projets contraires aux vôtres sans les détruire ? Evitez de les juger d’après une morale humaine : les mésanges sont plus méchantes que les chats ou les araignées !
4. Ne vous culpabilisez pas. Si vous jardinez dans le respect des autres espèces (y compris vos voisins !), vous avez le droit de protéger vos cultures. Le jardin est un partenariat, pas un sacrifice. On est tous prédateurs, on est tous proies (Gilles Clément). Un jardin, c’est un hommage au vivant mais la mort est aussi partout présente. La Méditerranée guérit de la sentimentalité romantique…
5. L’utile contre le beau : oubliez complètement ce faux problème ! A la place du jardin d’agrément (même enrichi d’un petit coin potager pour se donner bonne conscience), optez pour le jardin multiple, à la fois par la diversité de son contenu et les usages que vous en faites, à longueur de journée et d’année. Pensez à tous les sens, pas seulement au regard.
Jardin des Sambucs (Jones)
6. En Méditerranée, on valorise les mains autant que la tête, l’artisanat autant que l’art officiel. Votre jardin est votre œuvre. Certains planifient, cherchant un thème principal qui confère sa cohérence à l’ensemble. D’autres se laissent guider selon les dons du ciel et des rencontres fortuites. Il y a autant de styles de jardins que de poèmes ou de peintures.
7. Restez ouverts à toutes sortes d’expériences jardinières. Pas la peine d’envier les jardins de grand luxe, ni de mépriser les jardins de banlieue ou de grand-mère. Il faut de tout pour faire un monde. L’essentiel est d’avoir SON jardin, une création personnelle, et non dictée par des modes. Respecter l’esprit des lieux et de sa région n’empêche pas de faire une vraie création personnelle, tout comme en cuisine.
8. Pensez local : profitez de ce que vous trouvez sur place ou à proximité. Choisissez des matériaux, textures, couleurs, volumes, en harmonie avec votre environnement. Evitez la pollution visuelle. Evitez aussi les éléments anonymes et passe-partout (et gourmands en ressources) comme le gazon et la haie de thuya. Quelles essences poussent bien dans les jardins voisins, sont typiques du lieu, appréciées sur ce terroir depuis longtemps ?
9. Pensez mondial : vos choix affectent les cours d’eau, la qualité de l’air, la santé des générations futures. Participez au « jardin planétaire ». Jardinez comme vous cuisinez – en profitant des saisons et des ressources locales mais en expérimentant aussi avec l’exotisme, tout en gardant un œil sur les espèces qui se comportent comme des envahisseurs dans votre région (l’ailante, l’herbe de la pampa…). Visitez d’autres jardins, à proximité ou plus loin…
10. Pensez slow : prenez le temps de bien regarder, sentir, frôler, picorer. Soyez disponibles à l’imprévu. Prévoir au jardin un lieu, des lieux de repos. Allongez-vous par terre, apprenez à «toucher et goûter la paix, le silence, le temps sans mesure, toutes choses qui, goûtées dans leur excellence, vous transforment en un être vivant que vous étiez loin de supposer ! » (Jean Giono.)
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